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L’appui d’une autre énergie

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  L’appui d’une autre énergie Il y a des jours où tout se resserre. Le corps. L’esprit. Et ce silence, autour, plus lourd que les douleurs. Il avance comme il peut. Il se rend aux rendez-vous. Il prend les traitements. Il attend les résultats. Il tient, mais il sent bien que quelque chose, en lui, s’éteint doucement. Une fatigue sans nom. Une solitude qu’il n’ose plus dire. Alors, parfois, il descend dans le bas de son village. Là où vit Gilbert le charmeur. On le connaît depuis toujours, cet homme-là. Ni médecin, ni sorcier. Juste quelqu’un qui écoute. Qui pose ses mains avec lenteur. Qui murmure des mots dont on ne sait pas toujours s’ils viennent de lui ou d’ailleurs. Il ne promet rien. Il ne guérit pas. Mais il accueille. Ce geste ne soigne pas au sens qu’en donnent les hôpitaux. Mais il soulage autrement. Il rouvre un passage. Un souffle. Un lieu intérieur où il peut, pour un moment, poser ce fardeau invisible qu’il porte seul depuis si longtemps. La maladie l’a éloigné intéri...

Le Dernier Souffle du Silence

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Le Dernier Souffle du Silence   Le jour se lève doucement.   Elle ouvre les yeux à six heures, comme chaque matin. Son corps connait l’heure sans avoir besoin d’une horloge. La lumière qui glisse par la petite fenêtre de la cuisine n’a rien de spectaculaire, mais elle lui suffit. Elle respire lentement, laisse ses muscles se réveiller, puis pose les pieds sur le sol froid. Ce contact la ramène à la réalité, a cette maison qui l’entoure depuis tant d’années. Le parquet, sous son poids, répond par de petits craquements familiers. Elle avance dans ce silence qui, à force d’être entendu, est devenu presque une présence.   Un espace rétréci   Elle se lave à l’évier, un peu penchée sur l’eau claire qui coule faiblement. Le miroir de l’étage, celui devant lequel elle soignait autrefois son apparence, reste hors de portée. Les marches ne sont plus un simple escalier, mais un obstacle auquel elle a renoncé. Ce renoncement n’a pas été brutal. Il s’est impose au fil des...

Sous la peau de l’homme

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  Sous la peau de l’homme Avant les fautes et les fuites Avant les fièvres du regard Avant les rêves qui s’effritent Et les départs sans au revoir Avant les mots, les silences Avant le doute, avant la nuit Avant que s’efface l’enfance Sous la fatigue et les oublis Il y avait ce souffle clair Cette innocence qui ne sait pas Que la tendresse peut se taire Et que la vie choisit ses pas Je revois mes mains minuscules Dans celles de ma mère, apaisé Un monde encore sans crépuscule Où rien ne pouvait me blesser J’étais un ange sans mémoire Sans ombre au bord du chemin Un cœur neuf, sans territoire Un matin qui ne craignait rien Puis l’homme est venu, maladroit Cherchant sa route, ses raisons Portant ses peurs comme des croix Et ses fiertés pour illusions Mais sous la cendre du visage Sous l’usure des lendemains Je sens parfois, au fond, l’image De cet enfant qui dort encore, très loin.

CE QUI DEMEURE

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  Quand la vie se fait lourde et que les liens se distendent, il reste encore la lumière du matin, le vent sur la peau, le souvenir d’un rire ancien. L’énergie ne vient plus des autres, mais de ce qui demeure en nous, de ce que nous avons aimé, transmis, tenté, écrit. Les forces changent de visage : elles ne poussent plus à courir, mais à rester debout, à regarder le monde sans amertume. Chaque existence laisse un éclat que d’autres ramasseront un jour. C’est ainsi que tout continue, même quand tout paraît fini.

La lumière se souvient

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  La lumière se souvient Je me souviens. Rien n’était prévu, rien n’était dit. Ton regard a trouvé le mien, et tout s’est éclairé. C’était simple, sans promesse, sans détour. Avant les mots, je savais déjà. Je t’ai serrée dans la lumière. Le monde s’est tu. Tout tenait dans cet instant. Le bonheur ne demandait rien, il était là, tranquille. Avant toi, j’étais seul, sans élan, sans route. Ton regard a ouvert une porte. Un souffle a traversé ma vie. J’ai senti revenir la clarté. Depuis, je garde ce moment en moi. L’amour brillait dans tes yeux, paisible et sûr. Il brillait encore dans ton sourire. Le temps a passé, la lumière s’est adoucie. Mais parfois, quand je ferme les yeux, je te revois, debout au bord du jour.

La lumière des vivants : La lumière des vivants

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  La Toussaint, le 1er novembre, est une fête catholique qui célèbre tous les saints, connus et inconnus. Pas seulement les grandes figures canonisées, mais aussi les anonymes, ceux dont la sainteté n’a laissé aucune trace officielle. C’est une fête de lumière, posée au cœur de l’automne, pour rappeler que la mort n’a pas le dernier mot. Elle a été instituée au VIIIe siècle par le pape Grégoire III, d’abord à Rome, puis étendue à toute l’Église. L’idée était d’honorer d’un seul coup cette multitude de vies offertes, sans devoir leur consacrer une date propre. Le lendemain, le 2 novembre, c’est la Commémoration des fidèles défunts : une journée de prière pour les morts. Mais dans la pratique, les deux fêtes se sont mêlées. Beaucoup vont au cimetière à la Toussaint, déposent des fleurs, entretiennent les tombes, se recueillent. Ce geste collectif fait lien entre les vivants et ceux qui les ont précédés. Donc, la Toussaint n’est pas la fête des morts, mais celle des vivants transfigur...

Croire encore en la vie

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  Croire encore en la vie Je ne crois pas que le monde soit devenu trop dur pour accueillir des enfants. Je crois plutôt qu’il est devenu trop étroit, refermé sur lui-même. Trop calculé aussi. On ne fait plus d’enfants, on en “prévoit”. On pèse le pour et le contre comme s’il s’agissait d’un placement. Pourtant, la vie ne s’est jamais mesurée à l’aune du confort. Quand je regarde autour de moi, je vois des existences lisses mais fragiles, pleines de peur à l’idée de manquer. Nous avons tant cherché à supprimer le risque que nous avons fini par étouffer le souffle même du vivant. Un enfant, c’est une promesse qui dérange l’ordre que l’on croyait acquis. Il oblige à renoncer à la maîtrise, à accueillir l’imprévisible, parfois l’inquiétude. Je me souviens d’une époque où la vie se transmettait sans discours. Les enfants arrivaient, les aînés veillaient, la communauté suivait. Personne ne se demandait si c’était “raisonnable” d’avoir un enfant. La question n’était pas économique, mais ...